Des Houris femmes pour les hommes ?
Des Houris femmes pour les hommes ?
Asma Lamrabet
Octobre 2017
On ne trouve dans le Coran aucun verset qui mentionne le nombre de houris, ni leur supposée vocation à être destinées aux hommes martyrs.
Le terme de houris, employé en français n’apparaît pas dans le Coran. C’est l’expression arabe de hûr ou hûr al-‘ain qu’on y trouve. À titre d’exemple voici des versets où ces termes sont mentionnés :
« C’est ainsi ! Et on les a unis (zawajnahoum – rendus paire) avec des hûr al-‘ain.» Coran 44 ;54
« Adossés à des lits bien rangés et nous les avons unis avec des hûr al-‘ain » Coran 52 ;20
« Des hûr retirées (maksûrât) dans des tentes » Coran 55 ;72
« Et des hûr al-‘ain comme des perles préservées » Coran 56 ;22.
Au sens premier, le terme hûr, selon Lisân al-‘Arab, signifie revenir vers quelque chose. Cette idée de retour se trouve aussi dans al-hawary, le fidèle ou l’allié, à l’exemple des adeptes de Jésus (hawariyyûn) cités dans le Coran.
Le sujet des houris est plutôt de l’ordre de la pure spéculation interprétative humaine. En effet, toute la littérature théologique concernant ces houris est le produit d’une exégèse classique prolifique qui s’est basée essentiellement sur les données historiques – dans l’ensemble pas toujours authentifiées – de certains hadiths du prophète.
Ces hadiths, largement instrumentalisés par l’idéologie extrémiste, prétendent aujourd’hui que ceux qui se donnent la mort tout en assassinant autrui, auront le statut de martyr, et des houris en prime, ce qui en soi est une double hérésie théologique selon la philosophie doctrinale de l’islam où se donner la mort et tuer des innocents est strictement interdit .
Le grand Ibn Arabi, dans son commentaire (Tafsîr Ibn Arabi) les décrit comme des esprits divins, célestes (nufûs al-malkutiyya), ni hommes ni femmes, purs, beaux et limpides dans leur âme, et non pas en rapport avec une quelconque représentation physique ou corporelle...Il s’agirait, pour lui, d’images sacrées et de merveilles dont la beauté incommensurable est inaccessible par la seule raison humaine...
Ce qu’un discours extrémiste véhicule aujourd’hui comme idées terrifiantes et dévalorisantes, trouve malheureusement sa matière première au sein des compilations traditionnelles d’interprétations que la pensée islamique d’aujourd’hui peine à contrecarrer.
Ces houris dans le discours islamique d’aujourd’hui ne sont que le reflet de notre flagrante et misérable réalité socioculturelle, celle d’une culture misogyne qui s’offre les corps des femmes comme ultime champ de bataille, ici et dans l’au-delà.
Pour plus de précisions voir : Asma Lamrabet ; « Islam et femmes : les questions qui fâchent » Editions En Toutes Lettres Février 2017.
À propos de l'auteur
ASMA LAMRABET
Native de Rabat (Maroc), Asma Lamrabet, exerce actuellement en tant que médecin biologiste à l’Hôpital Avicennes de Rabat. Elle a exercé durant plusieurs années (de 1995 à 2003) comme médecin bénévole dans des hôpitaux publics d'Espagne et d’Amérique latine, notamment à Santiago du Chili et à Mexico.